• « GÉNOCIDE », PAR LA SOCIÉTÉ DES AMIS DE LOUIS RIEL

    Article d'Ismène Toussaint 

    Statue du premier ministre John A. Macdonald
    À plusieurs reprises, des militants l'ont couverte de peinture imitant du sang

    GÉNOCIDE

    PAR LA SOCIÉTÉ DES AMIS DE LOUIS RIEL (19 MAI 2019)

    (TRADUIT DE L’ANGLAIS ET ANNOTÉ PAR ISMÈNE TOUSSAINT)

    Les Amis de Louis Riel (Friends of Louis Riel Society) sont une société non-partisane qui s’est constituée en Colombie-Britannique afin d'engager les soutiens canadiens et internationaux du chef métis à participer à des discussions et des actions créatives visant à lui donner une place correcte dans l’histoire du Canada. Elle a une vision à long terme de la réconciliation entre les Blancs et les Autochtones, susceptible de mener à la reconnaissance de Louis Riel comme « Père autochtone (métis) de la Confédération ». 

    La formation de la Confédération du Canada, en 1867, s’accompagna du transfert du contrôle législatif et judiciaire au nouveau premier ministre, Sir John A. Macdonald (1). Celui-ci commença immédiatement à consolider sa nouvelle nation en acquérant secrètement le Nord-Ouest auprès de la Compagnie de la Baie d’Hudson (2), une société financière internationale,  et en s’immisçant dans les affaires des nations autochtones qui demeuraient dans tout le pays.

    En 1869, le nouveau parlement canadien, outrepassant les engagements qui avaient été pris par les Britanniques par le biais de la Proclamation royale de 1763 et de l’Acte de Québec (3), fit adopter la désormais célèbre « Loi des Indiens ». Solidement fondée sur la « doctrine de la découverte » (4), la plus coloniale des lois - ou plus exactement, des séries de lois -, déclara que les Indiens ne pouvaient être légalement propriétaires d’aucune terre sans un permis délivré par le ministre. Incroyable mais vrai, cela comprenait les anciens territoires des Mi’kmaqs de la côte Atlantique, les Hurons Wendats du Saint-Laurent et de la région des Grands Lacs, les Cris et les Dénés des grandes forêts boréales, et bien d’autres, tels la Confédération des Haudenosaunee (Iroquois) et les Assiniboines, les Cris et les Pieds-Noirs des Plaines, et les centaines de nations de la côte Ouest, jusqu’aux Innus de l’Arctique. Cet acte perdure de nos jours. 

    Tous ces peuples avaient d’anciens droits héréditaires sur leurs terres. La Grande-Bretagne avait également accordé des droits à nombre d’entre eux pour services rendus. Par conséquent,  cette ingérence monumentale dans les affaires des nations autochtones et dans leur droit aux terres héréditaires garanties par des traités, était contraire à la Proclamation royale de 1763, ainsi qu’aux traités subséquents qui avaient été signés entre les Britanniques et les nations autochtones. Dans de nombreux cas, les premiers comptaient sur le soutien militaire de ces nations lors des guerres prolongées avec les Français et les Américains, et leur avaient octroyé certains droits que le Canada venait d'abroger.

    Non seulement par un fait naturel mais dans la loi britannique, la « possession indienne » (autochtone) de la terre, fondée à la fois sur le droit héréditaire et sur le droit juridique, était antérieure à la Confédération canadienne, souvent depuis des siècles ; et elle avait été garantie par des traités confirmés par la Couronne britannique et son système législatif. Mais rien de tout cela ne concernait le pragmatique John A. Macdonald et les avides colonialistes canadiens de toutes les couleurs politiques : libéraux, conservateurs, wigs, tories, réformistes. Macdonald refusa aux Indiens leurs propres terres et des droits humains. Les Indiens étaient désormais les « pupilles » d’un état canadien « emplumé », dépourvues de droits, en particulier de ceux de propriété.

    John A. Macdonald est légitimement reconnu comme le « père du Dominion du Canada ». Mais la question doit se poser : « Quelle sorte de père condamne les membres de sa famille à une vie de désespoir, arrachant les enfants à leurs proches, les privant de nourriture - « Mange un jour - crève de faim le suivant ? ». La politique de Macdonald rejoint le critère de génocide, tel que l’avait souligné l’ONU en 1948, lors de sa Convention sur le génocide qui inclut « les actes commis dans l’intention de détruire tout ou partie d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux ».

    On doit féliciter et remercier le Musée canadien des Droits de l'homme (Canadian Museum of Human Rights) [fondé en 2014 à Winnipeg, Manitoba] pour avoir reconnu publiquement le génocide commis contre les Autochtones ; et aussi de considérer l’expérience coloniale du Canada tout entière, depuis le premier contact avec eux jusqu’à aujourd’hui, comme un génocide.

    Cet article a été repris dans louisriel.org, décembre 2020,  http://www.louisriel.org/ArticleView.php?article_id=117

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    NOTES

    1. John Alexander Macdonald (1815-1891). Homme d’État canadien d'origine écossaise. Né à Glasgow, il émigra à Kingston (Haut-Canada) dans sa jeunesse et devint membre fondateur du parti libéral-conservateur après les élections de 1854. En 1867, il accéda au poste de premier ministre du Canada et se fit « bâtisseur de la nation », selon ses propres termes, en adjoignant le Québec, le Manitoba, les Territoires du Nord-Ouest, la Colombie-Britannique et l’Île du Prince-Édouard à la Confédération. Toutefois, son implication dans le scandale de la construction du chemin de fer Canadian Pacific – il fut accusé d'avoir touché des pots-de-vin – l’obligea à démissionner en 1873. Grâce à une politique tarifaire qui protégeait le secteur manufacturier en imposant des taxes élevées sur les importations, il revint au pouvoir en 1878 et travailla à une forme de coopération avec l’Angleterre. Mais la pendaison de Louis Riel (le 16 novembre 1885), dont il est le premier responsable, jointe à des problèmes d’alcoolisme et d’opiomanie, rendit la fin de son mandat difficile : il perdit ses appuis politiques au Québec et se heurta à une opposition de plus en plus forte. Il fut néanmoins réélu à la tête du pays en 1890. Au Canada anglais, il est considéré comme l’un des « Pères de la Confédération ».

    2. La Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH ; Hudson’s Bay Compagny, HBC) fut fondée en 1670 à Londres par deux coureurs de bois français, Pierre-Esprit Radisson et Médard Chouart des Groseillers, pour la traite des fourrures dans la baie d’Hudson (Amérique du Nord). Après la chute de la Nouvelle-France en 1763, elle étendit ses postes de traite vers l’ouest et le nord du futur Canada. Au début des années 1800, elle entra en compétition avec la Compagnie du Nord-Ouest (CNO), originaire de Montréal, puis fusionna en 1821 avec elle sous son propre nom, au terme d’un conflit sanglant. Détentrice pendant près d’un demi-siècle de la plus grande partie du territoire canadien, celui-ci lui fut octroyé officiellement par Londres en 1870, en même temps qu’un droit exclusif de traite des fourrures. Cette cession provoqua la révolte des Métis de la colonie de la rivière Rouge, qui fut écrasée dans le sang. Par la suite, les postes de traite devinrent des magasins généraux, puis une chaîne de grands magasins qui existe toujours.

    3. La proclamation de 1763 fut délivrée le 7 octobre de la même année par George III, roi  de Grande-Bretagne, après l'acquisition de territoires français du Canada (et d'une partie de la Louisiane) à la fin de la Guerre de Sept Ans. Elle avait pour objectif d’administer ceux-ci, d’organiser les relations avec les Autochtones en réglementant la traite des fourrures, la colonisation et l’achat de nouvelles terres à la frontière occidentale, et aussi d’assimiler les francophones.

    Seconde loi constitutive de l’administration britannique, l’Acte de Québec, qui reçut la sanction royale le 22 juin 1774, rétablit le régime seigneurial des terres et reconnut aux Canadiens français le droit de conserver leur langue, leur droit civil et leur religion catholique. En 1791, il fut abrogé pour être en grande partie remplacé par l'Acte constitutionnel.

    4. La doctrine de la découverte fut utilisée pendant plusieurs siècles par les colons pour justifier l'occupation, le pillage et l'expansion de territoires au nom de principes juridiques et autres. On la définit actuellement comme « l'héritage légal de principes discriminatoires visant à justifier le comportement des pays découvreurs et colonisateurs ». Selon des membres de l’ONU, elle fut « un vecteur essentiel de l’asservissement des peuples autochtones ».

      

    © Société des Amis de Louis Riel (Friends of Louis Riel Society)

     

     

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